L’intelligence artificielle s’impose peu à peu comme un levier de transformation des services publics africains. Si des solutions locales émergent dans la santé, l’éducation ou l’agriculture, leur déploiement à grande échelle reste conditionné par des investissements structurels et un cadre éthique clair. 

L’Afrique multiplie les initiatives d’IA pour moderniser ses services publics, notamment dans des secteurs stratégiques comme la santé, l’agriculture ou encore l’éducation. Selon le rapport « Governing in the Age of AI – Unlocking a New Era of Transformation in Africa », publié en avril 2025 par le Tony Blair Institute, l’IA peut accroître la productivité des États, améliorer la transparence et renforcer l’accès à des services essentiels à moindre coût. L’Afrique, qui ne représente encore que 1 % des investissements mondiaux en IA, pourrait tirer parti d’une approche ciblée, fondée sur des cas d’usage concrets et adaptés aux réalités locales. 

Santé : diagnostics low-cost et logistique intelligente 

En Afrique, les applications de l’IA dans le secteur de la santé se multiplient. Au Nigeria, la start-up Ubenwa a mis au point un algorithme capable d’analyser les pleurs des nouveau-nés pour détecter précocement des signes d’asphyxie, réduisant ainsi la mortalité néonatale dans les zones rurales. À Nairobi, Neural Labs teste NeuralSight, une plateforme d’analyse d’imagerie médicale basée sur l’IA qui permet de diagnostiquer plus de 20 pathologies respiratoires et mammaires à moindre coût. 

Agriculture : productivité augmentée à l’échelle des petits exploitants 

L’agritech africaine adopte massivement l’IA pour transformer les exploitations. Aerobotics, basée en Afrique du Sud, exploite drones et imagerie satellite pour détecter maladies et ravageurs avant qu’ils ne se propagent, contribuant à augmenter les rendements. Farmerline, au Ghana, a lancé Darli, un chatbot accessible via WhatsApp dans 27 langues africaines, délivrant des conseils agricoles adaptés. Lancé en mars 2024, ce service touche déjà 110 000 agriculteurs. Ces innovations facilitent l’accès à l’expertise agricole, aident à réduire les intrants et renforcent la résilience climatique. 

Éducation : assistance personnalisée pour pallier la pénurie d’enseignants 

Avec un déficit estimé à 15 millions d’enseignants sur le continent selon l’UNESCO, l’IA est perçue comme un outil d’appui précieux. SkillBridge, en Éthiopie, et M‑Shule, au Kenya, proposent des assistants intelligents qui guident les élèves via SMS ou application, avec un taux de précision de 87 % dans des exercices préparatoires. Afrilearn, de son côté, s’appuie sur un modèle « learn-and-earn » pour permettre aux élèves nigérians d’accéder gratuitement à des ressources pédagogiques enrichies et interactives. 

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Des stratégies nationales encore inégalement réparties 

À ce jour, environ 11 pays africains ont adopté une stratégie nationale d’intelligence artificielle, dont le Rwanda, l’Afrique du Sud, le Maroc, l’Égypte, le Ghana, le Kenya, la Tunisie et le Bénin. Selon l’indice AI Readiness Index 2023 de l’Université d’Oxford, la région Afrique subsaharienne obtient une note moyenne de 30,2 sur 100, loin derrière l’Asie de l’Est (52,6). Les principaux freins identifiés : manque d’infrastructures numériques, déficit de données de qualité et faibles capacités institutionnelles. 

À l’échelle continentale, l’Union africaine a adopté en 2024 une Stratégie africaine pour l’intelligence artificielle, qui encourage une IA responsable, inclusive et éthique. Ce cadre prévoit notamment le développement de standards de gouvernance des données, la mutualisation des infrastructures régionales et la promotion des innovations locales. 

L’IA africaine entre promesse locale et défis systémiques 

L’Afrique dispose aujourd’hui de cas d’usage tangibles d’IA à fort impact dans la santé, l’agriculture, l’éducation et la gestion publique. Des start-up suscitées démontrent la capacité du continent à innover localement. Pourtant, sans un effort structurant autour des infrastructures, de la formation des talents et de la gouvernance éthique, ces initiatives risquent de rester marginales. 

Le rapport du Tony Blair Institute propose en réponse la création d’un AI Financing Compact for Africa, visant à mutualiser les investissements pour les centres de données, les identités numériques et les programmes de formation certifiante. De son côté, le secteur privé, porté par les start-ups et les hubs technologiques, joue un rôle moteur dans le déploiement de solutions adaptées aux contextes africains. 

Samira Njoya

Edité par Sèna D. B. de Sodji

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Posted On mardi, 24 juin 2025 07:45 Written by

Dans un contexte marqué par une régulation plus stricte du secteur fintech en Afrique de l’Ouest, les acteurs du numérique financier doivent innover pour poursuivre leur développement. Fondée en Côte d’Ivoire, Djamo fait figure de pionnière parmi les fintechs francophones, en proposant une solution inclusive qui connecte les populations non bancarisées aux services financiers essentiels. Portée par une récente levée de fonds de 17 millions de dollars, la plus importante jamais enregistrée dans l’écosystème tech ivoirien, l’entreprise entend élargir son champ d’action, tant sur le plan régional qu’en matière de services aux PME.

Dans cet entretien exclusif, Régis Bamba, cofondateur de Djamo, revient sur les grandes étapes de la croissance de la start-up, la concurrence, la pression réglementaire de la BCEAO, ainsi que sa vision de l’inclusion financière en Afrique.

Agence Ecofin : Comment est née l'idée de Djamo ?

Régis Bamba : L'idée vient de mon associé, Hassan Bourgi. À son retour en Côte d'Ivoire, il a rencontré de grandes difficultés pour ouvrir un compte bancaire. Il s’est dit que si lui, avec son profil très digital, peinait autant, qu’en était-il du reste de la population ?

IMG1« Ce qui fait avancer le marché, c’est surtout la demande. »

Cette expérience, couplée à un taux de bancarisation encore très faible, nous a confortés dans l’idée qu’il fallait repenser l’accès aux services financiers. Nous nous sommes demandé pourquoi cet accès ne passerait pas, comme pour le mobile money, par le téléphone. C’est ainsi qu’est née l’idée de Djamo. Notre premier produit a été une carte Visa accessible directement via un téléphone.

Agence Ecofin : Quelles ont été les grandes étapes du développement de Djamo ?

Régis Bamba : Djamo a cinq ans aujourd’hui. Nous avons démarré fin 2019 avec les premières lignes de code et la recherche de partenaires. En 2020, malgré la pandémie, nous avons levé 300 000 euros auprès de business angels. Début 2021, nous avons intégré Y Combinator, un accélérateur de start-up basé dans la Silicon Valley, ce qui nous a véritablement propulsés. Fin 2021, nous avons lancé le produit Djamo et obtenu nos premiers clients, avec une croissance rapide.

« Nous avons démarré fin 2019 avec les premières lignes de code et la recherche de partenaires. En 2020, malgré la pandémie, nous avons levé 300 000 euros auprès de business angels. »

En 2022, nous avons dépassé le million de transactions. En 2023, nous avons enrichi notre offre avec des services comme le coffre, les transferts, et surtout un produit d’investissement sur la BRVM – une première pour une fintech, avec une licence officielle. Nous avons aussi lancé nos activités au Sénégal. Fin 2024, nous avons introduit une offre business. Et en 2025, nous avons franchi le cap d’un million d’utilisateurs actifs, c’est-à-dire des utilisateurs effectuant des transactions régulières sur la plateforme.

Agence Ecofin : Comment Djamo se positionne-t-elle par rapport aux banques et aux autres fintechs ?

Régis Bamba : Djamo ne se positionne pas contre les banques. Nous ne sommes pas des concurrents, mais des partenaires. Notre objectif est de créer un pont entre les banques et les populations. Là où les banques n'ont pas toujours la souplesse pour atteindre certains publics, nous apportons une solution technologique qui facilite l'accès à leurs services.

« Là où les banques n'ont pas toujours la souplesse pour atteindre certains publics, nous apportons une solution technologique qui facilite l'accès à leurs services. »

Tous nos produits sont d’ailleurs développés en partenariat avec des banques, conformément à la régulation de l’UEMOA. Ce qui fait notre force, c’est une expérience client fluide, sans paperasse, sans frais cachés, avec un support disponible 24/7. Nous contribuons aussi à l’éducation financière en aidant les clients à découvrir des services bancaires au-delà du simple mobile money.

Ce dernier reste utile, mais limité : dépôts, retraits, transferts. Pour une inclusion financière complète, il faut aller plus loin : accès au crédit, à l’investissement, à l’épargne. Djamo se positionne donc comme un acteur complémentaire, agile, capable de travailler aussi bien avec les banques qu’avec d’autres fintechs, pour améliorer l’inclusion et l’éducation financière.

Agence Ecofin : Malgré un taux d’inclusion financière supérieur à 83 % grâce aux services électroniques, le taux de bancarisation reste autour de 25 %. Pourquoi, selon vous, les banques ont-elles autant de mal à toucher la population ?

Régis Bamba : Plusieurs facteurs l’expliquent. D’abord, la banque est un métier exigeant : il s’agit de gérer l’argent des gens, avec des obligations strictes imposées par la Banque centrale. Ces contraintes peuvent parfois nuire à l’expérience client. Ensuite, beaucoup de banques n’ont pas une culture de l’innovation. Elles fonctionnent comme de grandes structures peu flexibles, alors que les besoins évoluent très vite dans un monde de plus en plus digital.

Les clients s’attendent à des services accessibles, simples, disponibles en ligne. Or, beaucoup de banques ont du mal à répondre à ces attentes, en particulier chez les jeunes.
Prenons l’exemple de l’ouverture d’un compte : dans une banque traditionnelle, cela demande de se déplacer, remplir des papiers, perdre du temps. Avec Djamo, quelques clics suffisent pour obtenir un RIB, sans quitter son bureau.

« Prenons l’exemple de l’ouverture d’un compte : dans une banque traditionnelle, cela demande de se déplacer, remplir des papiers, perdre du temps. Avec Djamo, quelques clics suffisent pour obtenir un RIB, sans quitter son bureau. »

Aujourd’hui, à l’ère de l’intelligence artificielle et de la dématérialisation, les banques doivent adopter une approche plus ouverte. Elles gagneraient à s’appuyer sur des fintechs comme la nôtre, plus agiles, plus technologiques, pour innover tout en restant dans le cadre réglementaire existant.

Agence Ecofin : En avril 2025, vous avez réalisé la plus grande levée de capital-risque en Côte d'Ivoire avec 17 millions de dollars mobilisés. Alors, quels sont les objectifs visés avec ces fonds ?

Régis Bamba : L’objectif, c’est clairement la croissance. En tant que start-up, notre ambition est d’avoir une trajectoire exponentielle. Cet argent va nous permettre d’investir dans la recherche et le développement pour trouver les bons leviers de croissance. Il servira aussi à construire les fondations nécessaires pour renforcer les partenariats que nous développons, notamment avec les banques. L’idée, c’est d’offrir toujours plus de services bancaires – comme le crédit, l’épargne, voire de l’investissement – tout en gardant la simplicité et l’accessibilité du Mobile Money. C’est un modèle que les gens maîtrisent bien, donc on veut s’en inspirer pour rendre les services bancaires aussi faciles d’accès que le Mobile Money.

Agence Ecofin : L’un des enjeux de cette levée est aussi de proposer des solutions adaptées aux besoins des PME, qui peinent encore à accéder au financement. Que préparez-vous de ce côté-là ?

Régis Bamba : Les PME, qui sont aussi parmi nos clients, nous disent toutes la même chose : elles aimeraient bénéficier de la simplicité de Djamo pour leur entreprise. Aujourd’hui, ouvrir un compte courant pour une société est encore trop compliqué et frustrant. Et dans notre base d’utilisateurs, on observe un segment d’entrepreneurs informels – ceux qui ont un emploi, mais développent aussi une activité à côté, ce qu’on appelle ici un "gombo". Avec le temps, ces activités se professionnalisent et ces entrepreneurs veulent pouvoir faire grandir leur entreprise avec des outils plus adaptés.

Notre défi, c’est donc de leur proposer des solutions professionnelles, tout en conservant la flexibilité qui fait la force de Djamo. Mais on avance prudemment : on veut d’abord bien comprendre leurs besoins, et surtout s’assurer qu’on dispose du cadre réglementaire adéquat pour proposer ces offres. C’est une évolution naturelle pour nous, car notre clientèle évolue aussi. On veut donc adapter notre simplicité au monde de l’entreprise – mais ce sera progressif.

Agence Ecofin : Vous avez évoqué votre présence au Sénégal depuis 2023. Quelles sont aujourd’hui vos ambitions d’expansion régionale ou internationale ?

Régis Bamba : Pour l’instant, nous restons concentrés sur la Côte d’Ivoire et le Sénégal, qui sont nos deux marchés prioritaires. Ce sont aussi les deux plus gros marchés de l’UEMOA. Il y a encore énormément d’opportunités à explorer dans ces pays, que ce soit en termes de services ou de segments de clientèle. Si demain, une expansion devait se faire, elle se ferait logiquement dans d’autres pays de l’UEMOA, car ils partagent la même réglementation. Cela simplifie beaucoup les choses : on connaît déjà les règles, les exigences en matière de conformité.

« Si demain, une expansion devait se faire, elle se ferait logiquement dans d’autres pays de l’UEMOA, car ils partagent la même réglementation. »

Mais pour le moment, notre stratégie, c’est de creuser en profondeur ces deux marchés. On veut y lancer de nouveaux services, consolider ceux qui existent déjà et toucher plus de personnes.

Agence Ecofin : Depuis le 6 mai, la BCEAO a lancé une campagne de régulation stricte du secteur des fintechs dans l’UEMOA, imposant des exigences renforcées pour l’agrément des établissements de paiement. Cela a conduit à des suspensions brutales d’activités, notamment au Sénégal, suscitant des inquiétudes. Comment Djamo s’adapte-t-il à ce nouveau cadre ?

Régis Bamba : Il faut rappeler que ce processus n’a pas démarré récemment. Cela fait deux ans que le sujet est sur la table, avec pas mal de pédagogie de la part du régulateur. Les fintechs ont donc eu le temps de s’y préparer. Ce qui s’est passé dernièrement au Sénégal est peut-être soudain dans sa forme, mais reste cohérent avec les annonces de la BCEAO.

De notre côté, nous étions prêts. Nous avons pris les devants, fait le nécessaire, et nous n’avons pas été impactés par ces suspensions. Malheureusement, certaines fintechs ont été touchées malgré leur volonté de se mettre en règle, mais on voit que la BCEAO commence à régulariser leur situation. Des agréments ont été délivrés récemment à celles qui étaient dans les clous.

Il faut aussi noter que cette situation ne concerne que le Sénégal. Les autres pays de l’UEMOA n’ont pas été particulièrement affectés. À mes yeux, c’est un passage obligé pour structurer et consolider l’écosystème. La BCEAO est plutôt ouverte à l’innovation, comparée à d’autres zones. Mais comme il s’agit d’argent, il est normal d’avoir un cadre rigoureux.

« La BCEAO est plutôt ouverte à l’innovation, comparée à d’autres zones. Mais comme il s’agit d’argent, il est normal d’avoir un cadre rigoureux. »

L’idée, c’est de permettre l’innovation dans un environnement sain et sécurisé. Et avec les projets en cours, notamment celui sur l’interopérabilité, je pense qu’on avance dans la bonne direction pour renforcer l’inclusion financière.

Agence Ecofin : Le secteur fintech ivoirien connaît un essor remarquable. Entre les acteurs comme vous, Push, Wave, ou les opérateurs télécoms qui se lancent aussi dans la fintech, la dynamique semble bien enclenchée. Qu’est-ce qui explique, selon vous, ce développement ?

Régis Bamba : Plusieurs tendances l’expliquent. D’abord, l’accès à Internet s’est nettement amélioré. Les prix ont beaucoup baissé, ce qui a permis à un plus grand nombre de personnes de se connecter. Ensuite, les smartphones sont devenus beaucoup plus abordables. Aujourd’hui, avec 30 000 ou 40 000 FCFA, on peut s’en procurer un. Cela n’était pas le cas il y a encore quelques années.

Tout cela a fait évoluer les usages : les gens sont de plus en plus connectés. Certains événements se déroulent entièrement en ligne, et la pandémie de Covid a accéléré cette digitalisation. Même nos parents et grands-parents sont désormais à l’aise avec WhatsApp ou les appels vidéo.

À cela s’ajoute un environnement réglementaire relativement favorable à l’innovation. La BCEAO joue un rôle facilitateur. Et surtout, la population est très réceptive. Le passage du cash au mobile money a été rapide, et aujourd’hui, on peut quasiment tout payer avec son téléphone. Cette adoption massive prépare le terrain pour la prochaine étape : la banque digitale.

« Aujourd’hui, on peut quasiment tout payer avec son téléphone. Cette adoption massive prépare le terrain pour la prochaine étape : la banque digitale. »

Les gens veulent désormais aller au-delà du simple dépôt ou retrait. Ils commencent à se poser des questions sur l’épargne, l’investissement, l’accès au crédit, etc. Cela crée une demande à laquelle les innovateurs peuvent répondre.

Enfin, il y a un contexte économique et politique relativement stable en Côte d’Ivoire. C’est un vrai facteur d’attractivité. Comparé à d’autres pays de la région comme le Nigeria ou le Ghana, qui sont confrontés à la dévaluation de leur monnaie, la Côte d’Ivoire offre plus de visibilité et de sécurité. Cela attire des entrepreneurs et des investisseurs qui voient dans ce pays un bon point de départ pour développer leurs projets.

Agence Ecofin : Peut-on dire que le gouvernement ivoirien accompagne activement cette dynamique ?

Régis Bamba : Oui, on peut le dire. Mais selon moi, ce n’est pas le principal moteur. Ce qui fait avancer le marché, c’est surtout la demande. Les besoins sont là, et des entrepreneurs y répondent avec des solutions concrètes. C’est la logique du marché : quand il y a une demande claire, et un environnement stable, les projets se lancent naturellement.

Comparé à d’autres marchés plus risqués, ici, les entrepreneurs n’hésitent pas. Le contexte est rassurant. C’est ce qui explique aussi pourquoi certains acteurs étrangers commencent à s’installer en Côte d’Ivoire.

Agence Ecofin : En parlant de la sphère anglophone, votre levée de fonds de 17 millions de dollars en 2024 dépasse celle de 2022 (14 millions). Mais comparée aux montants mobilisés dans des pays comme le Nigeria ou le Kenya, cela reste encore modeste. Qu’est-ce qui explique cette différence entre les zones francophone et anglophone ?

Régis Bamba : Ces marchés sont tout simplement plus matures que les nôtres. Ils ont pris de l’avance, sans doute parce qu’ils ont osé prendre certains risques plus tôt. Résultat, leur écosystème a évolué plus rapidement, avec davantage de compétences disponibles. Et comme il n’y a pas de barrière linguistique, les investisseurs internationaux s’orientent naturellement vers ces pays. Il faut aussi noter que ce sont de grands marchés : Nigeria, Kenya, Ghana… Cela leur donne une attractivité certaine.

Mais la tendance évolue. Dans la zone CFA, nous avons des environnements économiques plus stables, sans dévaluation monétaire, ce qui rassure les investisseurs. Et ces derniers commencent à en prendre conscience.

« Dans la zone CFA, nous avons des environnements économiques plus stables, sans dévaluation monétaire, ce qui rassure les investisseurs. Et ces derniers commencent à en prendre conscience. »

La levée de fonds que nous avons réalisée en est une preuve concrète : c’est la plus importante jamais réalisée par une start-up ivoirienne. Cela montre que c’est possible et que la francophonie attire désormais l’attention.

À nous maintenant, en tant qu’entrepreneurs, d’être à la hauteur. Il faut proposer des solutions innovantes, solides et pérennes, capables de convaincre durablement les investisseurs. Je suis convaincu que c’est un mouvement qui va s’amplifier. Chez Djamo, on commence déjà à voir cette dynamique : certains de nos collaborateurs sont inspirés au point de vouloir lancer leur propre entreprise, que nous pourrons accompagner. Cela crée un écosystème vertueux, dans lequel d’autres fintechs viendront aussi se greffer. Dans cinq ans, je suis persuadé que l’Afrique francophone aura considérablement gagné en maturité, au point de peser très lourd dans la tech africaine.

Agence Ecofin : Face à la montée de la concurrence sur votre segment, avec des acteurs qui proposent des services similaires, comment Djamo entend-il garder son avance ?

Régis Bamba : Il faut garder en tête que nos marchés restent jeunes. La vraie concurrence, ce n’est pas une autre fintech : c’est le cash. Aujourd’hui, 80 % des transactions en Afrique subsaharienne se font encore en espèces. Cela veut dire que nous avons un terrain immense à conquérir, et qu’il y a de la place pour plusieurs acteurs. En général, on ne se marche même pas sur les pieds, chacun allant chercher un segment non encore converti.

« La vraie concurrence, ce n’est pas une autre fintech : c’est le cash. Aujourd’hui, 80 % des transactions en Afrique subsaharienne se font encore en espèces. »

Bien sûr, certains avancent plus vite, mais cela ne menace pas nécessairement les autres. Chez Djamo, nous misons sur la collaboration. Il y a des enjeux cruciaux comme la sécurité des transactions, la protection des données ou encore la lutte contre la fraude. Ce sont des défis qu’aucune fintech ne peut relever seule. Nous avons donc choisi d’ouvrir notre plateforme à d’autres acteurs, pour créer un écosystème intégré. Ce modèle coopératif est, à mon sens, la meilleure voie pour faire progresser l’inclusion financière.

Agence Ecofin : Et sur le plan social, quel rôle doivent jouer les fintechs dans des pays comme la Côte d’Ivoire ?

Régis Bamba : Selon moi, l’éducation financière est le pilier principal. Dans nos systèmes éducatifs, ce sujet est largement absent, alors qu’il détermine énormément la qualité de vie future des individus. Une fintech a donc le devoir de former ses utilisateurs, de les aider à comprendre comment gérer leur argent intelligemment.

Chez Djamo, nous y consacrons beaucoup de ressources. Chaque produit est conçu pour être simple, accessible, et nous créons du contenu – vidéos, articles, tutos – pour accompagner l’utilisateur. L’idée, c’est de transmettre des compétences réutilisables, même sur d’autres plateformes. C’est cela, pour moi, la vraie valeur sociale d’une fintech.

Agence Ecofin : L’éducation financière manque souvent dès le plus jeune âge…

Régis Bamba : Exactement. Et les conséquences sont visibles : régulièrement, on voit des vagues d’arnaques type Ponzi, ou des investissements douteux qui séduisent des gens mal informés. Notre rôle, c’est de sensibiliser, de rappeler que la vraie richesse se construit sur la durée, avec de bonnes habitudes. Cela passe aussi par des prix accessibles. Grâce à la technologie, nous réduisons nos charges – pas besoin d’ouvrir cinq agences, tout se fait à distance. Ces économies, on peut les répercuter sur le client pour proposer des tarifs plus bas. C’est ainsi qu’on crée un cercle vertueux qui facilite l’adoption du digital.

Agence Ecofin : Une dernière question : envisagez-vous, à terme, une entrée en bourse, notamment à la BRVM ?

Régis Bamba : C’est une piste que nous ne négligeons pas. Étant donné notre position dans l’écosystème, nous avons au moins le devoir d’y réfléchir sérieusement. La BRVM est un pilier de l’environnement financier régional, et cela aurait du sens d’y inscrire un modèle comme le nôtre. Bien sûr, cela devra aussi faire sens pour les investisseurs et pour Djamo. Mais ce n’est pas à exclure. C’est une option crédible dans notre vision à long terme.

Interview réalisée par Charlène N’dimon

Posted On dimanche, 22 juin 2025 19:36 Written by

Chaque week-end, la rédaction de We Are Tech Africa vous rappelle les principales informations de la semaine dans le domaine du numérique en Afrique, ainsi que leurs implications.

Orange - AFD : un nouveau cadre de coopération pour soutenir le numérique en zone MEA

Orange et l’Agence française de développement ont signé un accord de trois ans pour renforcer leur coopération numérique en Afrique et au Moyen-Orient. Le partenariat vise à réduire la fracture numérique, développer des infrastructures, former les jeunes et promouvoir des solutions durables, notamment dans les zones rurales et vulnérables.

Blockchain : Bitget et l’UNICEF s’associent pour former 300 000 jeunes dans 8 pays

Bitget s’est associée à l’UNICEF Luxembourg pour former 300 000 jeunes dans le monde, dont des Marocains et des Sud-Africains, aux compétences numériques et à la blockchain d’ici 2025. L’initiative, centrée sur l’inclusion des filles, vise à réduire les inégalités de genre et à soutenir l’éducation numérique en Afrique et au-delà.

L’Algérie lance une plateforme pour faciliter les campagnes de dons de sang

L’Algérie a lancé une plateforme numérique pour faciliter le don de sang et améliorer la coordination entre donneurs et centres de transfusion. Accessible en ligne, elle permet l’inscription, la géolocalisation des centres et la gestion des stocks, s’inscrivant dans une stratégie de modernisation du système national de collecte.

Burundi : Mediabox déploie un système interconnecté pour les services fonciers

La société burundaise Mediabox a lancé un système de gestion électronique des documents au sein de l’administration foncière, avec l’appui de la Banque mondiale. Ce dispositif interne vise à améliorer la traçabilité, la sécurité et l’efficacité des opérations foncières, dans un pays confronté à de lourds défis en matière de gouvernance foncière. 

Comores : le numérique s’invite à l’école avec les plateformes E-Shiyo et E-Msomo

Les Comores ont lancé deux plateformes éducatives, E-Shiyo et E-Msomo, pour améliorer l’accès à l’éducation et moderniser la gestion scolaire. Soutenue par l’UNICEF et ANADEN, l’initiative s’inscrit dans la stratégie Comores Numérique 2028 et vise une gouvernance éducative plus efficace, malgré les défis liés à la connectivité et à l’équipement.

Posted On dimanche, 22 juin 2025 13:49 Written by

Face aux retards persistants dans l’exécution des politiques publiques et au manque de transparence dans l’administration, le gouvernement congolais mise sur le numérique. Avec le SISAG, il espère moderniser le suivi de son action et renforcer la redevabilité. 

La République démocratique du Congo s’apprête à lancer, au troisième trimestre 2025, un Système d’information de suivi des actions gouvernementales baptisé SISAG. Ce dispositif technologique vise à centraliser et actualiser en temps réel l’ensemble des données liées à la mise en œuvre des projets prioritaires portés par l’exécutif. 

Conçu pour renforcer la rigueur et la réactivité dans l’exécution des projets publics, le SISAG introduit plusieurs fonctionnalités stratégiques, parmi lesquelles : la visualisation en temps réel de l’état d’avancement des projets grâce à des tableaux de bord dynamiques ; la génération automatique d’alertes en cas de retard ou de blocage ; la centralisation des données entre les ministères ; et l’interconnexion avec des institutions clés pour assurer la fiabilité et la fluidité des informations. 

L’outil repose sur une interopérabilité avec des institutions telles que l’Institut national de la statistique (INS), le Secrétariat national de renforcement des capacités (SENAREC) ou encore l’Agence pour le développement du numérique (ADN), assurant une circulation fluide et fiable des données. 

Le système est soutenu par une Unité technique spécialisée, l’USAG, chargée de coordonner les ministères, de compiler les données et de produire des recommandations fondées sur des analyses objectives. Ce dispositif entend améliorer la reddition de comptes et doter le gouvernement d’un outil d’aide à la décision plus efficace. 

Un outil au service du PAG 2024–2028 

Ce virage numérique s’inscrit dans le cadre du Programme d’actions du gouvernement (PAG) pour la période 2024–2028, récemment adopté par les autorités congolaises. Ce programme ambitionne d’ancrer l’action publique dans une logique de performance, avec des indicateurs clairs, des objectifs quantifiables et une obligation de résultats. 

Le SISAG vient ainsi renforcer l’alignement entre les ambitions politiques et les moyens technologiques, en assurant un suivi minutieux des engagements pris, tout en facilitant une évaluation continue des résultats. Il représente un levier clé pour accélérer les investissements publics, améliorer la coordination interministérielle et renforcer la transparence dans la gestion des ressources. 

Une démarche inspirée de modèles internationaux 

La RDC s’inspire ainsi d’initiatives mises en œuvre dans d’autres pays africains. Le Rwanda, par exemple, utilise depuis plusieurs années un système de performance basé sur des contrats d’objectifs annuels appelé Imihigo. Le Bénin, de son côté, s’appuie sur l’outil MPAT pour évaluer la performance des ministères. Ces expériences ont démontré que, bien conçus, ces mécanismes peuvent améliorer la redevabilité et dynamiser l’action publique. 

Une fois le SISAG pleinement opérationnel, l’exécutif congolais prévoit son extension progressive aux administrations provinciales, pour assurer un suivi plus granulaire des projets locaux. À terme, cet outil pourrait aussi intégrer un volet de transparence publique, en ouvrant une partie des données au public afin d’accroître la confiance des citoyens dans l’action publique. Mais pour que cette ambition se concrétise, il faudra assurer un déploiement rigoureux, un pilotage politique soutenu et une appropriation durable par l’ensemble des acteurs concernés. 

Samira Njoya

Edité par Sèna D. B. de Sodji

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Posted On vendredi, 20 juin 2025 11:54 Written by

Alors que le numérique transforme les systèmes éducatifs dans de nombreux pays africains, les Comores amorcent à leur tour cette mutation, à travers des outils conçus pour relever les défis d’accessibilité, d’équité et de modernisation. 

Les Comores disposent désormais de deux plateformes éducatives, E-Shiyo et E-Msomo. Initiées par le ministère de l’Éducation nationale, avec le soutien technique de l’Agence nationale de développement du numérique (ANADEN) et l’appui financier de l’UNICEF, ces solutions visent à améliorer l’accès à l’éducation et à renforcer la gouvernance du secteur. 

La plateforme E-Shiyo propose une bibliothèque numérique de manuels scolaires destinée aux élèves du préélémentaire et du primaire. Accessible en ligne sur l’ensemble du territoire, elle permet aux enfants d’accéder aux contenus pédagogiques à tout moment, à partir de tout appareil connecté. 

E-Msomo, de son côté, numérise la gestion administrative des établissements scolaires. Elle introduit un système centralisé pour la gestion des bulletins, un identifiant unique pour chaque élève, ainsi qu’un suivi automatisé des résultats académiques. Cette modernisation vise à améliorer la traçabilité des parcours scolaires, à renforcer la transparence et à faciliter la prise de décision par les autorités éducatives. 

L’initiative s’inscrit dans le cadre de la stratégie « Comores Numérique 2028 », qui ambitionne de transformer le pays grâce au numérique et d’accroître la contribution du secteur au PIB à hauteur de 5 % d’ici 2028. La modernisation des secteurs clés, comme l’éducation, y occupe une place centrale. À l’échelle du continent, la vague e-learning traduit un potentiel croissant. Selon Ambient Insight, le marché africain de l’apprentissage en ligne devrait dépasser 1,5 milliard USD d’ici 2030. 

Au-delà de la distribution de manuels et de bulletins, ces outils marquent une avancée vers une gouvernance plus rigoureuse, grâce à des données consolidées pour l’évaluation des performances scolaires, une réduction des erreurs et une allocation plus efficace des ressources. Les prochaines étapes incluent le renforcement de la connectivité dans l’archipel, où le taux de pénétration d’Internet reste limité à 35,7 % selon Datareportal, l’équipement des écoles en matériel numérique, la formation des enseignants à leur usage et la protection des données. 

Samira Njoya

Edité par Sèna D. B. de Sodji

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Posted On vendredi, 20 juin 2025 07:36 Written by

Le gouvernement ivoirien mise sur le numérique pour rapprocher les services de base des citoyens. De la justice à l’éducation, tous les secteurs sont engagés dans cette dynamique de modernisation. 

Le Conseil des ministres a adopté le mercredi 18 juin un décret instituant, sur proposition des ministères de la Justice et de la Transition numérique, le certificat de nationalité numérique et l’attestation récognitive de nationalité en Côte d’Ivoire. Le porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly (photo), a expliqué que cette réforme allège considérablement le processus de délivrance du certificat de nationalité. Elle introduit également l’attestation récognitive de nationalité, délivrée sur simple présentation d’une copie d’un certificat existant. 

L’attestation récognitive de nationalité, équivalente à la « déclaration recognitive de nationalité » en droit français, permet à tout Ivoirien déjà en possession d’un certificat de nationalité valide et non contesté d’obtenir une version électronique simplifiée, sans avoir à refaire toute la procédure. Pour cela, les juridictions transmettent les copies des certificats délivrés à un dépositaire central chargé de les conserver et de faciliter leur réédition. 

L’accès à ces documents se fait via la plateforme e-justice.ci, la même qui permet déjà d’obtenir en ligne des actes tels que le casier judiciaire ou l’acte d’individualité. Le certificat numérique est sécurisé par un cachet électronique visible (CEV), garantissant l’authenticité du document et permettant à tout usager ou administration de vérifier directement sa validité. 

Le projet s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale de transformation numérique, qui place la modernisation des services publics au cœur de ses priorités. Selon le dernier rapport des Nations unies sur l’e-gouvernance, la Côte d’Ivoire se classe au 124ᵉ rang sur 193 pays, avec un score de 0,5587 à l’indice de développement de l’administration en ligne. Ce positionnement témoigne d’une progression portée notamment par des initiatives comme e-Justice, mais souligne aussi les marges de progrès pour atteindre les standards des administrations les plus digitalisées. 

Cette réforme vise à réduire les délais et les coûts des démarches, tout en renforçant la lutte contre la fraude documentaire et en fluidifiant l’accès aux services publics. Dans un contexte de modernisation administrative, ces solutions contribueront à renforcer la confiance des citoyens et à favoriser l’inclusion numérique. L’enjeu est désormais d’assurer une infrastructure fiable, une interopérabilité des plateformes et la formation du personnel pour pérenniser cette avancée. 

Samira Njoya

Edité par Sèna D. B. de Sodji

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Posted On jeudi, 19 juin 2025 10:09 Written by

La transformation numérique est l’une des priorités du gouvernement zimbabwéen. L’exécutif a par exemple annoncé en avril dernier un programme visant à connecter les 2400 circonscriptions administratives du pays au haut débit Internet d’ici 2030. 

Le Zimbabwe devrait se doter d’un Système de gestion électronique des documents et des archives (EDRMS) estimé à 3 millions USD d’ici la fin de l’année. C’est ce qu’a révélé Brenda Mamvura (photo, à droite), directrice générale des Archives nationales du Zimbabwe (NAZ), dans un entretien accordé le mardi 17 juin au média local Herald Online. C’était en marge de la 28ᵉ conférence de la branche régionale d’Afrique de l’Est et australe du Conseil international des archives (ESARBICA), qui se déroule du lundi 16 au vendredi 20 juin à Victoria Falls. 

Mme Mamvura a précisé qu’une entreprise a remporté l’appel d’offres et que 60 % des processus d’acquisition sont déjà achevés. Les ministères des Finances, de la Fonction publique ainsi que le Bureau du président et du cabinet ont été choisis pour tester le système avant son déploiement à l’échelle nationale. 

Cette initiative s’inscrit dans la volonté du gouvernement de hisser le Zimbabwe au rang des pays à revenu intermédiaire supérieur d’ici 2030, en misant sur le numérique comme levier de transformation. Les autorités entendent intégrer pleinement les TIC dans l’ensemble de la société et dans tous les secteurs de l’économie, afin de stimuler un développement socio-économique rapide et durable. Dans l’administration publique, l’exécutif vise une amélioration significative de la qualité des services, une gouvernance plus efficace et réactive aux attentes des citoyens, une gestion optimisée des ressources publiques, ainsi qu’une plus grande participation citoyenne aux affaires publiques. 

« Les avantages d’un système EDRMS sont évidents. D’abord, l’intégration des systèmes, qui permet une coordination fluide entre les départements. Ensuite, une meilleure efficacité — les institutions publiques et les entreprises publiques pourront servir leurs clients plus rapidement et plus efficacement », a expliqué Mme Mamvura. 

Il faudra toutefois attendre le lancement effectif du système. Pour l’instant, le Zimbabwe n’en est qu’à l’étape pilote, avec trois ministères sélectionnés pour tester l’EDRMS. Par ailleurs, le processus de numérisation soulève plusieurs interrogations, notamment sur les compétences numériques des agents publics, la solidité de l’infrastructure technologique, la disponibilité du matériel informatique adapté, l’accès à un Internet fiable, ou encore la sécurisation des données sensibles. 

Isaac K. Kassouwi

Edité par Sèna D. B. de Sodji

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Posted On jeudi, 19 juin 2025 07:51 Written by

Selon le think tank américain Brookings, 230 millions d’emplois en Afrique subsaharienne exigeront des compétences numériques d’ici 2030. Le continent peut devenir un vivier de talents, mais cela nécessite des investissements majeurs dans la formation et le développement des compétences. 

Le ministre de la Formation et de l’Enseignement professionnels, Yacine El Mahdi Oualid (photo), a annoncé, mardi 17 juin, l’intégration progressive de 40 nouvelles spécialités numériques dès la rentrée prochaine. Cette annonce a été faite à l’occasion d’une rencontre nationale intitulée « Les nouveaux métiers dans le domaine de la technologie de l'information ». 

Ces nouvelles filières seront déployées dans plusieurs instituts et centres d’excellence répartis sur l’ensemble du territoire national. L’objectif est de moderniser l’offre de formation professionnelle et de l’aligner davantage sur les besoins réels de l’économie algérienne, en particulier dans les secteurs technologiques à forte croissance. La démarche vise également à renforcer l’insertion professionnelle des diplômés en intégrant des compétences très demandées sur le marché du travail. 

Cette réforme s’intègre à une stratégie nationale plus vaste de transformation numérique. La Stratégie nationale de transformation numérique (SNTN), adoptée récemment, ambitionne de former 500 000 spécialistes en TIC tout en réduisant de 40 % la fuite des talents spécialisés vers l’étranger. Cette politique volontariste vise à accompagner la diversification de l’économie nationale, encore fortement dépendante des hydrocarbures, en misant sur un vivier local de compétences numériques. 

En marge de cette rencontre, plusieurs conventions de coopération ont été signées, notamment entre le ministère et la Société nationale d’assurance (SAA), pour développer des mécanismes de formation continue et d’apprentissage. Deux autres accords ont été conclus avec Mobilis et la société de formation à distance Beeform Academy, renforçant ainsi les synergies entre secteur public, entreprises et prestataires privés de formation. 

Grâce à cette réforme, les autorités visent à améliorer l’insertion professionnelle des jeunes, à renforcer l’écosystème numérique national et à développer un vivier de talents pour soutenir les ambitions technologiques du pays. À terme, ces efforts pourraient contribuer à faire de l’Algérie un pôle régional en matière de compétences numériques, tout en répondant à la demande locale d’emplois qualifiés dans les TIC. 

Samira Njoya

Edité par Sèna D. B. de Sodji

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Posted On mercredi, 18 juin 2025 11:54 Written by

Les autorités burundaises intensifient leurs efforts pour développer les TIC et accélérer la transformation numérique. Cette dynamique touche désormais tous les secteurs, y compris l’administration foncière, qui s’engage résolument vers la dématérialisation de ses services. 

La société burundaise Mediabox a annoncé, mardi 17 juin, la mise en service d’un Système de gestion électronique des documents (EDRMS) au sein de la Direction des titres fonciers et du cadastre national (DTFCN). Financé par la Banque mondiale, ce système numérique vise à améliorer la gestion interne des opérations foncières en facilitant l’accès aux documents, l’archivage sécurisé, la traçabilité des actions et la transparence administrative. 

L’EDRMS, à la différence d’un portail public, est un outil exclusivement réservé aux agents de l’administration foncière. Il permet une consultation rapide et structurée des dossiers, tout en garantissant une traçabilité complète des opérations réalisées par les services compétents. L’objectif est de rationaliser les processus internes, de réduire les délais de traitement et de sécuriser les informations relatives à la propriété foncière. 

La solution développée par Mediabox est interconnectée avec deux autres plateformes utilisées par la DTFCN : le Building Permit System (BPS), chargé de gérer les demandes de permis de construire et la délivrance des premiers titres de propriété, ainsi que le Property Management System (PMS), qui prend en charge les mises à jour des titres existants, qu’il s’agisse de transferts, de corrections ou d’hypothèques. L’ensemble constitue un écosystème numérique intégré, garantissant la continuité et la fiabilité des opérations foncières, de la demande initiale à la gestion post-délivrance. 

Ce projet s’inscrit dans un contexte marqué par des défis persistants dans le secteur foncier burundais : lourdeurs administratives, absence de centralisation des archives, insécurité juridique des titres et lenteur dans la délivrance des documents. L’initiative vise à remédier à ces défis en outillant les agents publics pour qu’ils puissent travailler plus efficacement et avec davantage de transparence. 

Cette initiative s’inscrit dans le cadre du Projet d’Appui aux Fondations de l’Économie Numérique (PAFEN), financé à hauteur de 92 millions de dollars par la Banque mondiale. Le programme vise notamment à étendre l’accès au haut débit dans les zones rurales, développer les compétences numériques et promouvoir la numérisation des services publics. Selon l’Indice de développement de l’E-Gouvernement (EGDI) 2024 des Nations unies, le Burundi se positionne au 183e rang sur 193 pays, ce qui témoigne de défis importants. 

La réussite du projet dépendra donc de la capacité à renforcer l’infrastructure numérique interne, à former les agents aux nouveaux outils technologiques, à instaurer une culture numérique au sein de l’administration et à assurer la sécurité des données sensibles liées au foncier. Il s’agira également de garantir la maintenance continue du système et d’assurer son évolutivité afin qu’il puisse répondre durablement aux besoins croissants de l’administration foncière. 

Samira Njoya

Edité par Sèna D. B. de Sodji

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Posted On mercredi, 18 juin 2025 10:14 Written by

Les autorités algériennes se mobilisent pour les campagnes de dons de sang. Elles ont décidé de se tourner vers la technologie pour mettre en place un système innovant, afin de mieux gérer ces activités.

Le ministère algérien de la Santé a annoncé le lancement d’une plateforme numérique destinée à faciliter le don de sang à travers tout le territoire national. L’outil, accessible via le site officiel du ministère, vise à renforcer la coordination entre les donneurs et les structures de transfusion sanguine, tout en centralisant les données relatives aux besoins en sang.

Dans le détail, la plateforme permet aux citoyens de s’inscrire comme donneurs, d’être informés en temps réel des campagnes de collecte, et de localiser les centres de don les plus proches. Les responsables des centres eux, peuvent mieux planifier les campagnes et actualiser les stocks en fonction des besoins recensés. Ce dispositif numérique s’inscrit dans le cadre d’une stratégie visant à moderniser le système national de collecte.

L’initiative survient dans un contexte de constante augmentation de la demande en produits sanguins. Elle fait suite à la deuxième édition de l’opération « Banque de la vie » lancée en octobre 2024 par la Radio algérienne. Parallèlement, l’Association nationale des pharmaciens algériens a initié en juin 2025 une campagne de sensibilisation sur le don de sang, mobilisant les officines comme relais d’information.

Au premier semestre de l'année 2024, plus de 354 000 poches de sang avaient été collectées à travers 256 centres de transfusion sanguine répartis sur tout le territoire, soit une hausse de 5,49% par rapport à la même période en 2023. En combinant approche numérique et mobilisation citoyenne, les autorités espèrent pérenniser les efforts de collecte tout au long de l’année, au-delà des traditionnels pics de solidarité observés durant certaines périodes de l’année.

Adoni Conrad Quenum

Edité par : Feriol Bewa

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Posted On mardi, 17 juin 2025 14:41 Written by
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