Nigeria : l’usage de l’edtech durant un an dans 9393 ménages ruraux y a fait reculer la non scolarisation de 42% (étude)

Par : La rédaction

Date de création : mardi, 02 mai 2023 17:55

Date de modification : 03 mai 2023 16:19

En Afrique, l’accès à l’école ne se heurte pas toujours à la modicité des moyens financiers des familles. L’environnement social, dans certains cas, peut aussi être considéré comme un frein. Alors que la transformation numérique se propage, l’usage bien orienté des TIC apporte des succès.

Selon la Banque mondiale, l’utilisation des technologies de l’information et de la communication dans l’apprentissage des enfants est bénéfique à plus d’un titre. L’institution internationale en veut pour preuve les données issues de l’expérience menée avec son assentiment entre 2018 et 2020 dans les Etats de Kano et de Jigawa, dans la région du nord-ouest du Nigeria. L’opération a porté sur 9393 ménages ruraux dont les enfants de 6 à 9 ans et leurs parents ont été soumis à deux approches d’éducation numérique. Elle a révélé à son terme un recul de la non scolarisation de 42 %.

L'échantillon de base sélectionné par la Banque mondiale comprenait 2 335 ménages vivant dans 32 communautés ayant reçu uniquement des vidéos aspirationnelles destinées aux parents pour faire changer leur mentalité et souhaiter mieux pour leurs enfants ; 2 345 ménages vivant dans 32 communautés ont reçu des vidéos aspirationnelles et 40 % d'entre eux ont reçu en plus un smartphone contenant du contenu éducatif. 4 713 ménages vivant dans 64 communautés ont servi de groupe de contrôle.

L’étude « Improving Enrollment and Learning through Videos and Mobiles Experimental Evidence from Northern Nigeria » a démontré que les vidéos aspirationnelles seules ont réduit les aspirations des filles à se marier à l'âge de 15 à 18 ans. Ces vidéos ont surtout eu de l’impact sur les parents des filles.  Dans les ménages qui ont reçu les vidéos aspirationnelles et le smartphone, les compétences en lecture et en calcul des enfants se sont respectivement améliorées de 0,46 point et 0,63 point par rapport au groupe témoin.

Selon la Banque mondiale, aucune preuve d'effets hétérogènes en fonction du sexe de l'enfant n’a été trouvé en général, « ce qui souligne le potentiel des technologies de l'information et de la communication pour atteindre efficacement les filles dans les milieux conservateurs, où la réclusion des filles ou un fort préjugé en faveur de l'éducation des garçons peut empêcher les filles d'accéder à l'enseignement formel ».

« Notre analyse hétérogène par sexe montre que les interventions ont fonctionné aussi bien pour les filles que pour les garçons et que l'ampleur des effets du traitement selon le sexe était généralement similaire pour les principaux résultats (inscription à l'école et compétences en lecture, écriture et calcul) », a précisé l’institution financière.

La pression sociale, un frein à l’éducation

Du fait que les vidéos et le smartphone pouvaient être utilisés par plusieurs membres du ménage dans ces environnements à faibles ressources, l’étude a aussi révélé que ces ressources ont permis d'améliorer les compétences en lecture et en calcul des frères et sœurs plus âgés non ciblés, de réduire la parentalité précoce des adolescents vivant dans les ménages traités et de diminuer l'insertion précoce sur le marché du travail.

Une aubaine selon la Banque mondiale qui indique que selon le rapport Reading and Access Research Activity de 2019, le nord du Nigeria enregistrait un retard d’apprentissage considérable par rapport à la moyenne nationale. Moins de 3 % des élèves de deuxième année des écoles primaires publiques pouvaient lire un texte en haoussa avec une compréhension de 80 % ou plus. Dans le nord-ouest du pays, seuls 29 % des femmes âgées de 15 à 49 ans et 59 % des hommes étaient alphabétisés. Seuls 40 % des 30-34 ans ont été scolarisés dans les zones du nord-est et du nord-ouest, contre 90 % dans les régions du sud-est et du sud-ouest du pays.

Cette situation, l’étude l’a justifiée par la forte adhésion des populations aux normes traditionnelles. L'institution juridique formelle de la charia qui s'applique dans la plupart des Etats du nord et couvre les questions sociales, civiles et pénales a renforcé les normes sociales qui encouragent les mariages précoces chez les adolescentes et donc les grossesses précoces. Tout ceci représentant des obstacles supplémentaires à l'éducation. L'émergence du groupe terroriste militant Boko Haram, qui se traduit par : « l'éducation occidentale est interdite », a créé un obstacle supplémentaire à la scolarisation et à la fréquentation de l'école dans le nord du pays.

Selon l'enquête World Values Survey 2017-2021 cité par la Banque mondiale, 42 % des personnes interrogées au Nigeria pensent que l'université est plus importante pour un garçon que pour une fille et 41 % pensent que les enfants d'âge préscolaire souffrent si la mère travaille. Ces normes contrastent avec celles observées dans d'autres pays comme le Kenya, où les proportions de la population ayant ces opinions sont respectivement de 18 % et 23 %.

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