Cofondateur de la plateforme Flutterwave, le Nigérian était considéré depuis plusieurs années déjà comme l’espoir de la fintech africaine. Alors que son entreprise vient de franchir un nouveau palier, il prend également un nouveau statut dans l’écosystème des entreprises tech du continent.
Ce 16 février, la fintech nigériane Flutterwave est devenue la start-up affichant la plus importante capitalisation boursière du continent africain. L’entreprise a annoncé avoir mobilisé 250 millions de dollars US dans le cadre d’un cycle de financement. Des ressources qui ont fait passer la valorisation de la plus récente licorne africaine à plus de 3 milliards USD.
« Nous avons juste mis en place une infrastructure commune ».
Pour Olugbenga Agboola, son cofondateur et PDG, le niveau actuel de Flutterwave correspond à l’ambition qu’il avait lorsqu’il a décidé de quitter son emploi à Access Bank pour se consacrer à sa création. Celui que tout l’écosystème continental surnomme le prince de la fintech a vraiment eu le nez creux en lançant ce qui est depuis quelques mois, la 4ème licorne africaine.
Un parcours bien rempli
L’une des choses les plus impressionnantes chez Olugbenga Agboola reste son CV. Né à Lagos au Nigeria en 1985, l’intéressé y a fait des études primaires et secondaires avant de partir aux États-Unis où il obtient un master en management du Massachusetts Institute of Technology (MIT) à Cambridge. Il obtient également une maîtrise en sécurité informatique et en ingénierie comportementale. Pas suffisant pour celui qui cherche alors à élargir ses horizons et à acquérir de l’expérience.
How Flutterwave's unicorn status could sprout more innovation in African fintech
— CNN Africa (@CNNAfrica) April 13, 2021
CEO Olugbenga Agboola (@TechProd_Arch) speaks to CNN about the milestone and his excitement for a new generation of African innovators. pic.twitter.com/uGvm2UAvHF
Il prolonge son cursus en décrochant les certifications standard de sécurité informatique de l'Université EC-Council au Nouveau-Mexique. Il étudie ensuite pour obtenir un diplôme en gestion de projet et en informatique avancée à l'Université de Westminster en Angleterre. C’est donc avec des compétences variées qu’il débute sa carrière comme développeur d'applications pour British Telecom Professional Services en 2003, avant de travailler l’année suivante chez Paypal en tant qu’ingénieur. Il rejoint ensuite l'équipe de développement de solutions d'infrastructure d'entreprise de la Guarantee Trust Bank de janvier 2005 à mars 2009, avant de passer à la Standard Bank Nigeria.
Il y travaille en tant que développeur de produits technologiques pendant deux années durant lesquelles il met au point une solution de paiement biométrique pour la banque. Il a également travaillé avec Google pour les services de paiement électroniques du géant du web, puis en tant que responsable des services financiers mobiles à la Sterling Bank. Il sera enfin responsable de l'innovation chez Access Bank de novembre 2014 à mai 2016.
Cette année-là, il a une idée, pas forcément révolutionnaire : faciliter l’interopérabilité des paiements en ligne. Ses différents postes lui ont permis d’observer sous toutes ses coutures le problème récurrent lié aux systèmes de paiement en Afrique, qui avaient du mal à interagir entre eux.
Ses différents postes lui ont permis d’observer sous toutes ses coutures le problème récurrent lié aux systèmes de paiement en Afrique, qui avaient du mal à interagir entre eux.
Son projet avec Flutterwave était de permettre à un client de payer un prestataire alors que les deux parties utilisent des processeurs différents. « L'Afrique a besoin de trois choses majeures, la logistique, les paiements et le commerce. Flutterwave s'occupe du système de paiement fragmenté en Afrique. Ce système fragmenté a besoin d'un moyen de paiement central pour faciliter le commerce sur le continent », explique Olugbenga Agboola.
Avec Iyinoluwa Aboyeji et une équipe d'autres spécialistes de la tech, de la banque et des paiements en ligne, il se lance donc pour connecter tous les types de paiements sur le continent et apporter une solution à usage unique. Au début, il est juste directeur technique pendant que le cofondateur Aboyedji occupe les fonctions de PDG. Mais lorsque ce dernier décide de quitter le poste, Olugbenga Agboola le remplace à la tête du projet. Et le succès ne tarde pas à frapper aux portes de la plateforme dont les services attirent rapidement des clients parmi les plus importants du paiement en ligne en Afrique. Les investisseurs y croient. En 2020, en plein confinement, l’entreprise accompagne 20 000 petites entreprises dans la création de boutiques en ligne pour faire survivre leurs activités. L’opération est un véritable succès.
Une licorne venue de Lagos
En mars 2021, Flutterwave est devenue la quatrième licorne (start-up valorisée à plus d'un milliard USD, mais non cotée en bourse et non filiale d’un grand groupe) du continent africain. La start-up fondée au Nigeria atteignait alors une valorisation de plus d'un milliard de dollars US, après en avoir levé 170 millions. Elle rejoignait dans ce cercle fermé Fawry et Interswitch, des sociétés de paiements respectivement égyptienne et nigériane, ainsi que le géant du commerce électronique Jumia.
En mars 2021, Flutterwave est devenue la quatrième licorne africaine.
Ce succès semblait surprendre beaucoup de monde, mais pas Olugbenga Agboola. Pour cet homme de 37 ans, sa fintech atteignait les niveaux qu’il imaginait lorsqu’en travaillant dans le secteur de la finance, il observait les insuffisances des flux de transferts d’argent entre l’Afrique et le reste du monde. Pour lui, le potentiel du projet Flutterwave était évident. Mais les choses se seraient-elles enclenchées aussi vite sans la pandémie de la Covid-19 ? Avec les confinements et la fermeture de nombreux services, le paiement dématérialisé est devenu indispensable. Visa, Mastercard, Facebook, Uber, Jumia et Alipay sont ainsi entrés en collaboration avec la plateforme dont les services brisent les barrières qui brident le continent en matière de transactions monétaires.
Visa, Mastercard, Facebook, Uber, Jumia et Alipay sont ainsi entrés en collaboration avec la plateforme dont les services brisent les barrières qui brident le continent en matière de transactions monétaires.
Avec son ami Iyinoluwa Aboyeji, Olugbenga Agboola a créé une plateforme permettant une interopérabilité entre de nombreux services de paiement en ligne. Le client et le prestataire n’ont pas à se soucier de la banque ou du processeur d’où part l’argent. Pourtant, l’homme estime n’avoir rien inventé. « Nous avons juste mis en place une infrastructure commune ». Flutterwave lui vaudra de nombreuses distinctions.
Flutterwave’s $250 million raise is to fortify its relentless marketing https://t.co/xWiEySOyc4
— Quartz Africa (@qzafrica) February 16, 2022
En 2021, il est notamment cité parmi les 100 jeunes de la planète qui façonneront l’avenir, selon le magazine américain Time.
Pour le nouveau prince de la fintech africaine, Flutterwave, qui en 2020 a traité plus de 80 millions de transactions pour une valeur de 7,5 milliards de dollars US dans 17 pays africains, a encore des progrès à faire et des territoires à conquérir.
Pour le nouveau prince de la fintech africaine, Flutterwave, qui en 2020 a traité plus de 80 millions de transactions pour une valeur de 7,5 milliards de dollars US dans 17 pays africains, a encore des progrès à faire et des territoires à conquérir.
L'entreprise souhaite qu'une cliente d'Afrique du Sud par exemple, puisse utiliser de manière simple son portefeuille numérique pour acheter des produits pharmaceutiques. Mais son principal objectif actuel est d’étendre le service en Afrique du Nord. Olugbenga Agboola ne s’arrêtera pas avant d’avoir atteint l’objectif qu’il s’est fixé. « L’Afrique n’est pas un pays, mais (au moment de payer en ligne, NDLR.) nous voulons donner l’impression que oui ».
Servan Ahougnon